Dans ce Péyi Gwadloup qui est sien, Netty Foggea, née Hypolite à Pointe-à-Pitre, a creusé un profond sillon d’engagements fiers et solidaires, tissés au fil des années, de ses rencontres et des événements qui ont marqué sa vie, sculpté son caractère bien trempé et affiné son sens de l’honneur et des valeurs partagées.
D’une fratrie de huit âmes forgées au creuset des choix de vie incarnés par un père (Achille) et une mère (Victoire) issus de Marie-Galante, aimants et attentionnés, elle a gardé le sens des responsabilités, le respect scrupuleux de la parole donnée et l’amour du travail bien fait, qui ont nourri ses aspirations professionnelles (assumées au sein des services fiscaux sa carrière durant) comme ses passions culinaires de Terrienne au grand cœur, toujours engagée dans les combats sociétaux de son temps, toujours friande de grands voyages mais bien ancrée en terre natale de connivence.
Guadeloupéenne dans l’âme
Témoin passionnée des traditions cultuelles et culturelles qui ont jalonné son parcours, gardienne de longue mémoire de nos “mès é labitid antan lontan”, Netty Foggea est aujourd’hui présidente d’honneur de l’emblématique “Association des Cuisinières de Guadeloupe”. Du “Cuistot Mutuel” des origines (1916), première mutuelle digne de ce nom en Guadeloupe, jusqu’à la solide association d’aujourd’hui, forte de plus de 200 membres parrainés (hommes, femmes et enfants mêlés), que de chemins parcourus avec elle, que de combats menés grâce à elle !
Sa vision inspirée d’un Péyi Gwadloup fier et fraternel à la fois, solidaire et protecteur envers ses grands aînés (hommes ou femmes) comme envers les plus démunis, elle continue de la nourrir en Grande Vigie du cœur et de l’esprit, au gré de l’expression vive d’une créolité assumée et jalousement préservée.
En bonne “Cordon bleu” célébrée par toutes les familles de cœur qui l’apprécient, Netty Foggea demeure passionnément attachée à la Gastronomie créole, aux plats “traditionnels” des grands rassemblements festifs, mais friande tout autant d’échappées belles vers de nouvelles recettes créées au gré de ses inspirations foisonnantes…
Liqueur d’anis rose “antan lontan” : la recette des initiés
Dégustée lors des festivités de Noël aux Antilles, la “liqueur d’anis rose” demande une préparation plus rigoureuse que le traditionnel “shrubb”. Au point de mériter sa réputation « d’alcool de plante pour initiés”.
L’élaboration cuisinée de ce “rhum coloré parfumé à l’essence d’anis” réclame un savoir-faire unique qui se transmet de générations en générations. La recette de famille marie-galantaise que nous livre Netty Foggea en est l’illustration manifeste.
Pour environ 2 litres de liqueur d’anis rose :
- Préparez un sirop (épais) avec les ingrédients finement dosés suivants :
1 kg de sucre (de canne, de préférence !)
800 ml d’eau
1 gousse de vanille
1 morceau de cannelle
1 zeste de citron vert.
- Faites cuire votre sirop à feu doux jusqu’à ce qu’il ait atteint la consistance voulue. Arrêtez alors sa cuisson… et laissez-le refroidir à température ambiante.
- Rajoutez-y ensuite :
1 litre de rhum blanc (de votre choix)
3 à 4 cuillerées à soupe d’essence d’anis
Quelques gouttes de carmin (en guise de colorant rouge).
- Agitez le tout, calmement mais fermement.
- Ne vous reste plus qu’à laisser reposer pendant 2 à 3 jours la liqueur d’anis “à la Marie-Galantaise” ainsi obtenue.
Elle s’imprégnera dignement de ses qualités natives, où le copeau de cannelle accompagné d’une fine gousse de vanille s’immisce dans le dialogue ancestral bien connu entre le rhum péyi et le citron vert. Un dialogue où s’invite la douceâtre saveur d’un sucre de canne teinté de carmin sanguin, pour magnifier enfin l’appétence d’une liqueur aromatique à nulle autre pareille.
Au moment de sa dégustation, voilà vos convives mûrs pour un plaisir inavouable… et si bien élaboré.
Texte : Daniel Rollé
Photos : Lou Denim