Présent au départ de la Route du Rhum à Saint-Malo avec le collectif UKA, Mark Brown œuvre à célébrer la beauté et la créativité des Caraïbes. Entretien avec un artiste d’Antigua conscient du pouvoir de l’art.
Vous entretenez une relation forte avec vos sujets : leur identité, la puissance de leur être. Qu’est-ce que votre art vous permet d’explorer ?
Mark Brown : Je suis un artiste qui vit actuellement à Antigua, où j’ai grandi en regardant le monde avec curiosité et émerveillement. L’art m’a toujours réconforté et donné l’occasion de vivre dans un monde auquel je n’avais pas accès, si ce n’est dans mon imaginaire fécond. Après l’université, j’ai enseigné l’art, tout naturellement, car je ne me voyais pas faire autre chose. Cela m’apportait tellement de joie ! J’ai toujours été conscient de son pouvoir. Puis j’ai fait une pause dans l’enseignement, vendu tout ce que j’avais et suis retourné en école d’art à la Barbade. Cela a beaucoup influencé mon approche de l’art aujourd’hui, puisque j’ai été initié à la peinture à l’huile et que j’ai développé ce qui est devenu le thème principal de mon travail :l’exploration de la personnalité et des états d’esprit.
Quelle personne êtes-vous ?
M.B. : Je me vois comme une personne très aimable et consciente de son cheminement personnel, non seulement pour apprendre à mieux me connaître, mais aussi pour comprendre ma relation avec le monde et les gens qui m’entourent. Je suis très empathique et célèbre volontiers les succès de mes pairs ; je suis aussi prompt à relever les défis que la vie me propose. Mon humanité est souvent mise à l’épreuve dans les malheurs que la vie nous réserve.
L’être est au cœur de votre œuvre. Il ne s’agit pas de plastique, c’est comme si vous cherchiez ce qu’il y a de plus profond chez ces femmes et ces hommes que vous peignez. Est-ce le sens de votre démarche d’artiste ?
M.B. : La condition humaine, en particulier l’identité, mais aussi d’autres thèmes comme la spiritualité, la race, le sexe et la sexualité, sont évidents dans mon travail. Ma quête de connaissance de moi-même et de compréhension de ma relation avec l’espace dans lequel j’existe contribue à mon engagement constant dans le travail figuratif. Je trouve que la peinture à l’huile m’aide à explorer cela au mieux, car je suis très à l’aise dans l’utilisation de ce médium pour mes toiles, généralement plus grandes que nature, avec des thèmes qui s’imposent dans l’espace, tant sur le plan visuel que sur celui de la taille. J’écoute souvent de la musique classique lorsque je travaille, car les sons m’aident à me concentrer. Le Boléro de Ravel est ma constante dans toutes les pièces que j’ai réalisées, depuis ma découverte de ce morceau de musique il y a des années.
Vous êtes à la une de Créola. Que pouvez-vous nous dire sur l’œuvre qui a été choisie ?
M.B. : Le travail qui a été choisi dévoile un peu de mon exploration de ce thème de l’identité et de mon engagement constant autour de cette idée. Les juxtapositions d’objets, d’idées, de personnes que j’ai croisées et les expériences par procuration sont autant de caractéristiques de cette œuvre.
Quel message pour les lecteurs de Créola ?
M.B. : J’aimerais nous encourager tous à développer notre curiosité envers nous- mêmes, à être bienveillants, non seulement envers nous-mêmes mais aussi envers les autres, et à continuer à trouver la beauté au quotidien. Arrêtez-vous et soyez présents à chaque instant. Apprenez des autres, partagez… Et mon mantra ultime : quand vous recevez, donnez et quand vous apprenez, enseignez !
Propos recueillis par Véronique Brusini